§ Le champ de bataille la nuit Les Misérables

Vers minuit, un homme rôdait, ou plutôt rampait, du côté du chemin creux d'Ohain. C'était, selon toute apparence, un de ceux que nous venons de caractériser, ni Anglais, ni Français, ni paysan, ni soldat, moins homme que goule, attiré par le flair des morts, ayant pour victoire le vol, venant dévaliser Waterloo. Il était vêtu d'une blouse qui était un peu une capote, il était inquiet et audacieux, il allait devant lui et regardait derrière lui. Qu'était-ce que cet homme? La nuit probablement en savait plus sur son compte que le jour. Il n'avait point de sac, mais évidemment de larges poches sous sa capote. De temps en temps, il s'arrêtait, examinait la plaine autour de lui comme pour voir s'il n'était pas observé, se penchait brusquement, dérangeait à terre quelque chose de silencieux et d'immobile, puis se redressait et s'esquivait. Son glissement, ses attitudes, son geste rapide et mystérieux le faisaient ressembler à ces larves crépusculaires qui hantent les ruines et que les anciennes légendes normandes appellent les Alleurs.

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