Assister aux exécutions constitue un devoir. On se montre la guillotine et l'on rit. On l'appelle de toutes sortes de petits noms:—Fin de la soupe,—Grognon,—La mère au Bleu (au ciel),—La dernière bouchée,—etc., etc. Pour ne rien perdre de la chose, on escalade les murs, on se hisse aux balcons, on monte aux arbres, on se suspend aux grilles, on s'accroche aux cheminées. Le gamin naît couvreur comme il naît marin. Un toit ne lui fait pas plus peur qu'un mât. Pas de fête qui vaille la Grève. Samson et l'abbé Montés sont les vrais noms populaires. On hue le patient pour l'encourager. On l'admire quelquefois. Lacenaire, gamin, voyant l'affreux Dautun mourir bravement, a dit ce mot où il y a un avenir: J'en étais jaloux. Dans la gaminerie, on ne connaît pas Voltaire, mais on connaît Papavoine. On mêle dans la même légende «les politiques» aux assassins. On a les traditions du dernier vêtement de tous. On sait que Tolleron avait un bonnet de chauffeur, Avril une casquette de loutre, Louvel un chapeau rond, que le vieux Delaporte était chauve et nu-tête, que Castaing était tout rose et très joli, que Bories avait une barbiche romantique, que Jean Martin avait gardé ses bretelles, que Lecouffé et sa mère se querellaient.—Ne vous reprochez donc pas votre panier, leur cria un gamin. Un autre, pour voir passer Debacker, trop petit dans la foule, avise la lanterne du quai et y grimpe. Un gendarme, de station là, fronce le sourcil.—Laissez-moi monter, m'sieu le gendarme, dit le gamin. Et pour attendrir l'autorité, il ajoute: Je ne tomberai pas.—Je m'importe peu que tu tombes, répond le gendarme.
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- Victor Hugo (auteur)