Ils ne se le firent pas dire deux fois. Tant pis! le gazouillement commença. Ils se parlaient bas, Marius accoudé sur sa chaise longue, Cosette debout près de lui.—Ô mon Dieu! murmurait Cosette, je vous revois. C'est toi, c'est vous! Être allé se battre comme cela! Mais pourquoi? C'est horrible. Pendant quatre mois, j'ai été morte. Oh! que c'est méchant d'avoir été à cette bataille! Qu'est-ce que je vous avais fait? Je vous pardonne, mais vous ne le ferez plus. Tout à l'heure, quand on est venu nous dire de venir, j'ai encore cru que j'allais mourir, mais c'était de joie. J'étais si triste! Je n'ai pas pris le temps de m'habiller, je dois faire peur. Qu'est-ce que vos parents diront de me voir une collerette toute chiffonnée? Mais parlez donc! Vous me laissez parler toute seule. Nous sommes toujours rue de l'Homme-Armé. Il paraît que votre épaule, c'était terrible. On m'a dit qu'on pouvait mettre le poing dedans. Et puis il paraît qu'on a coupé les chairs avec des ciseaux. C'est ça qui est affreux. J'ai pleuré, je n'ai plus d'yeux. C'est drôle qu'on puisse souffrir comme cela. Votre grand-père a l'air très bon! Ne vous dérangez pas, ne vous mettez pas sur le coude, prenez garde, vous allez vous faire du mal. Oh! comme je suis heureuse! C'est donc fini, le malheur! Je suis toute sotte. Je voulais vous dire des choses que je ne sais plus du tout. M'aimez-vous toujours? Nous demeurons rue de l'Homme-Armé. Il n'y a pas de jardin. J'ai fait de la charpie tout le temps; tenez, monsieur, regardez, c'est votre faute, j'ai un durillon aux doigts.—Ange! disait Marius.
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- Victor Hugo (auteur)